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28 octobre 2013

L’avenir des soins de santé en Amérique du Nord : existe-t-il une convergence États-Unis-Canada dans la donne?

DÉJEUNER AVEC LES CHEFS
VENDREDI 18 OCTOBRE 2013

Présentations et mot de bienvenue du modérateur, Anton Hart, président de HealthcareBoard et éditeur de Longwoods Publishing. M. Hart remercie les parrains de l’événement, le Conseil canadien de la santé et Accenture, avant de présenter les chefs du jour :
Trudy Lieberman, ancienne présidente de l’Association of Health Care Journalists des États-Unis, s’occupe actuellement de la section santé de la Columbia Journalism Review. Mme Lieberman visite quatre villes canadiennes en qualité de titulaire d'une bourse d'études Fulbright et d’invitée de l’Evidence Network of Canadian Health Policy, connu sous le nom d’EvidenceNetwork.ca.
André Picard est reporteur et chroniqueur en matière de santé au Globe and Mail, et lance un nouvel ouvrage le 30 octobre, par l’entremise du Conference Board of Canada.
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TRUDY LIEBERMAN commence par répondre à ce qui est, à son avis, la principale question qui intéresse les participants, à savoir « en quoi consiste l’Obamacare? ». Elle donne ensuite un aperçu de l’Obamacare, tout en mentionnant qu’André Picard abordera les domaines de convergence entre les systèmes de santé des deux pays.
Qu’est-ce que l’Affordable Care Act? Tout d’abord, indique Mme Lieberman, cette loi ne procure pas une assurance maladie à tous les Américains. Elle vise le marché individuel, là où se rendent les gens pour recevoir des soins de santé lorsqu’ils n’ont pas d’assurance. Encore là, les assureurs de ce marché ne couvrent souvent pas certaines affections préexistantes, comme l’asthme. Grâce à l’Obamacare, les personnes touchées auront moins de mal à magasiner dans ce marché.
Mme Lieberman écrit depuis 20 ans sur les soins de santé aux États-Unis et sait que les Américains ont du mal à naviguer dans ce système.
Quelque 25 millions de personnes, aux États-Unis, souscrivent une assurance sur le marché individuel; ce sont ces personnes qu’Obamacare veut aider. Certaines personnes ont déjà souscrit une assurance maladie dans le passé, tandis que d’autres le font pour la première fois. Afin de persuader les gens d’adopter ce système, le gouvernement offre des subventions. Pourtant, 40 % du marché individuel ne remplissent pas les conditions requises pour l’octroi d’une subvention, sans compter les sanctions qui sont imposées pour la non-souscription d’une assurance, et ce, même si le coût d’une bonne police pourrait s’élever à plus de 16 000 dollars.
La population s’inquiète et ne sait pas si les subventions suffiront à se procurer une police d’assurance maladie convenable ou si elles perdureront. Les Américains de la classe moyenne sont plus particulièrement touchés.
La loi sur la réforme exigeait un élargissement de Medicaid, le programme fédéral-État destiné aux pauvres, mais 27 États ont décidé de ne pas procéder à cet élargissement et de laisser les personnes dont les revenus sont sous le seuil de pauvreté devant une absence d’option. Ces personnes, privées de la possibilité d’acquisition dans les groupes d’échange, sont trop pauvres pour souscrire une assurance par leurs propres moyens.
À son avis, le talon d’Achille de l’Obamacare est le manque d’élargissement de Medicaid.
La confusion qui entoure l’Obamacare réside également dans le fait que la presse et les médias n’ont pas toujours bien expliqué la question au public américain.

AUTRES POINTS IMPORTANTS
L’Obamacare ne crée pas d’équité. Les groupes d’échange proposent quatre types de régimes. La plupart des Américains devraient opter pour le régime bronze, qui couvre 60 % des coûts. Le régime argent couvre 70 % des coûts, le régime or, 80 %, et le régime platine, 90 %. De nombreux États ne seront toutefois pas en mesure d’offrir le régime platine, trop coûteux pour la plupart des acheteurs potentiels.
Les dépenses assumées par les individus sont élevées. Les franchises seront de l’ordre de 4 000 dollars à 6 000 dollars pour une police familiale, mais pourraient atteindre des sommes aussi élevées que 10 000 dollars à 20 000 dollars. La coassurance correspond au pourcentage de l’assurance qu’un patient doit assumer, comme pour l’imagerie diagnostique, non couverte par les régimes.
Plusieurs réductions de coûts ont été réalisées, notamment pour transférer les services offerts en milieu hospitalier à des établissements de consultations externes. Les assureurs demandent aux personnes de payer une grande part du coût partagé pour les services les plus utilisés. Ce point n’est pas encore bien compris par la population américaine.
L’Obamacare ne comporte pas de clause de limitation des coûts.
Mme Lieberman ne sait pas si l’Obamacare fonctionnera et pense qu’il faudra au moins deux ou troiscycles d’assurance pour savoir ce que les assurances feront des primes et si les gens souscriront et auront vraiment une assurance.
Malgré l’objectif d’offrir des soins de santé abordables, elle prévoit que les Américains ne les obtiendront pas.
L’administration et les médias auraient pu faire mieux pour promouvoir la nouvelle loi, selon Mme Lieberman. Leurs manques ont provoqué une sorte de mouvement de rejet de l’Obamacare. Toutefois, on n’a pas parlé de façon soutenue de ce que cette loi pouvait faire et fera. L’obligation de souscrire l’assurance maladie n’a jamais été clairement énoncée, ce qui était sans doute un acte délibéré de la part de l’administration en vue d’éviter les réactions défavorables. Ironiquement, les Républicains ont été les premiers à présenter ce type de régime, dans les années 1990, pour contrer les plans de l’administration Clinton.
Mme Lieberman estime que la presse aurait pu mieux exposer la situation au public pour que les choses soient plus claires, parce que la plupart des Américains sont plutôt embrouillés.
ANDRÉ PICARD remercie Trudy et indique que son exposé lui en apprend toujours plus.
Son propos est axé sur les problèmes communs auxquels sont confrontés le Canada et les États-Unis.
Il précise que, de bien des manières, nous faisons les choses de la même manière des deux côtés de la frontière, exception faite des débats, ce qui nous devrait nous tenir à l’écart de l’outrecuidance. Le Canada n’a pas de « loi sur les soins abordables ». Selon M. Picard, il existe de grandes disparités entre les provinces, mais nous évitons d’en parler.
Nous sommes en outre confrontés à un grand nombre de problèmes financiers similaires à ceux de nos voisins, mais là encore, pas un mot sur le sujet. Les soins de santé, au Canada, couvrent seulement 70 % des coûts. Les Canadiens assument environ 30 % des frais médicaux, parce que plus d’éléments, comme les médicaments, ne sont pas couverts.

PROBLÈMES COMMUNS
1)    TRANSFERT DES SOINS À LA COLLECTIVITÉ. Les modèles hospitaliers doivent se transformer en modèles communautaires. Aucun régime ou organisme ne satisfait aux demandes et aux besoins de soins à domicile et de soins infirmiers à domicile.
2)    SOINS PRIMAIRES. Il faut de meilleurs services de soins primaires. Un point de coordination central pour les soins de santé doit être fixé – du genre qui procure un soutien tout au long du parcours du patient. Nous savons que les événements fâcheux se produisent au cours de la transition en raison du manque de coordination, insiste M. Picard. Alors, qui se chargera de nous coordonner et de nous guider sur le chemin complexe des soins?
3)    Nécessité de passer d’un MODÈLE DE SOINS AIGUS à un MODÈLE DE SOINS CHRONIQUES.
4)    MÉDICAMENTS : Les coûts élevés créent un énorme vide dans le système canadien. Les régimes publics couvrent à peine 45 % des médicaments. Les régimes privés resserrent également les cordons de leurs bourses. Ainsi, près de 600 000 Canadiens ne bénéficient d’aucune couverture des médicaments onéreux, ce qui constitue un trou béant dans le régime d’assurance-maladie.
5)    DÉTERMINANTS SOCIAUX : L’inégalité a des effets massifs sur le bien-être des gens.
6)    QUALITÉ : Ce point est gigantesque. Des erreurs médicales ou des manifestations indésirables qui découlent d’un manque de qualité font partie des principales causes de décès évitables. La population veut des soins de santé abordables, mais pas au mépris de la qualité.
7)    RATIONNEMENT : Les États-Unis rationnent les soins sur le plan économique. Vous n’obtiendrez pas de soins que vous n’êtes pas en mesure de payer. Au Canada, les services sont congestionnés, ce qui crée des listes d’attente pour certains types de soins. Le rationnement est une réalité, il suffit de trouver la meilleure façon de l’appliquer.
8)    LES PATIENTS QUI UTILISENT LES SOINS DE SANTÉ À OUTRANCE : Au Canada, 1 % des patients utilisent 25 % des soins, alors qu’une autre proportion de 5 % en consomme 50 %. Il est possible de contrôler les coûts par une meilleure gestion des patients qui présentent des cas difficiles. Nous devons nous montrer plus novateurs et plus ingénieux, souligne M. Picard. Un homme, par exemple, présentait toutes sortes de problèmes de santé pour lesquels il a visité les services des urgences à 238 reprises en un an, pour un coût estimatif de 1,5 million de dollars au système. On a décidé de lui affecter une infirmière à temps plein, pour un coût de 60 000 dollars par année. Cette infirmière a même trouvé un appartement pour l’homme en question. Elle est une sorte de phare. L’année suivante, cet homme n’a rendu que 60 visites aux services des urgences. Cette solution pragmatique a permis d’économiser près de un million de dollars.
9)    PUBLIC PAR OPPOSITION À PRIVÉ : Le Canada possède les deux systèmes, que nous le sachions ou nonLes États-Unis les possèdent aussi. Nous devons parler de la bonne proportion de soins de santé publics et privés. À l’heure actuelle, elle est d’environ 70-30.

Les deux pays doivent avoir de vraies conversations sur les soins de santé. Mais quelle est la bonne tribune pour tenir ce genre de discussion où règne trop d’extrémisme? Alors, comment avoir cette discussion on ne peut plus nécessaire? demande M. Picard.
TRUDY LIEBERMAN : Les soins de longue durée constituent un problème de taille aux États-Unis. Il est intéressant de voir ce que le pays a fait concernant cette question. L’Affordable Care Act comprenait une Class Act, défendue par feu le sénateur Ted Kennedy. Elle n’était pas très populaire, au début. L’idée sous-jacente consistait à investir un peu dans le système fédéral, puis à puiser dans ce même système plus tard dans la vie. Mais la disposition a été abrogée parce qu’elle n’aurait pas fonctionné : personne n’aurait cotisé à un programme volontaire.
Depuis l’abrogation de la Class Act, on n’a pratiquement plus parlé des soins à domicile aux États-Unis.
Nous avons toutefois une chose qui a relativement bien fonctionné, l’Older Americans Act, et qui remonte à l’administration Johnson. Cette loi fournit des services pour que les personnes âgées restent à la maison. Elle n’a malheureusement pas reçu suffisamment de fonds pour au cours des dernières décennies, ce qui a entraîné la création de longues listes d’attente pour des services de soins à domicile dans presque tous les États. Certaines personnes attendent des mois juste pour bénéficier des services de repas chauds de la popote roulante. LE PERSONNEL FAIT DE SON MIEUX MAIS, BIEN SOUVENT, LE MEILLEUR NE SUFFIT PAS, a dit quelqu’un.

QUESTIONS/COMMENTAIRES de l’auditoire
1)    DR CHARLES WRIGHT, membre du conseil, Conseil canadien de la santé : Ces propos m’ont beaucoup éclairé. Vous avez utilisé le mot « rationnement », qui fait grincer des dents. Si on pouvait récupérer une partie des soins inutiles, il faudrait instaurer un genre de rationnement, mais au moins, le système serait plus viable.

ANDRÉ PICARD : Entre 25 et 30 % des soins de santé sont fournis en excès. Nous devons rationner les soins là où cette mesure fonctionne et est efficace. Des soins rationnés, fondés sur des données probantes.

TRUDY LIEBERMAN : Nous tenons ces propos depuis bien des années, mais aucun geste n’est posé en ce sens. Certains puissants intéressés aiment faire des analyses additionnelles, et il est difficile de négocier avec ces forces.

2)    SHOLOM GLOUBERMAN, président, Patients Canada : Nous ne disposons pas de services de santé dans la collectivité. Nous n’établissons pas de partenariat avec les patients en soins chroniques. Nous avons une profusion de soins hospitaliers et très peu de services communautaires – au Canada, nous investissons une fraction de ce que dépense la Grande-Bretagne en services communautaires. Les assurances ne les couvrent pas, mais le font pour les hospitalisations, par exemple. Notre population vieillit, et les maladies chroniques font petit à petit partie du quotidien. Nous ne traitons pas cette question adéquatement. Les patients ne sont pas des partenaires dans le cadre de leurs soins. Nous devons commencer à mettre sur pied des services communautaires, parce qu’ils ne sont pas couverts par les assurances.

ANDRÉ PICARD : Il y a indéniablement là des problèmes d’administration. La création de l’assurance maladie remonte aux années 1950 et correspondait à la démographie de l’époque. Cette variable a changé, tout comme les besoins. Mais le système ne s’est pas ajusté pour tenir compte des changements démographiques.

3)    QUESTION : Qui doit déterminer la frontière entre la nécessité et la futilité des soins? Qu’est-ce qui découlera de la prochaine décision de la Cour suprême du Canada?

ANDRÉ PICARD : Le fait que les tribunaux tranchent la question est déplorable, comme l’est le manque de courage politique, dans ce pays, pour traiter de cette affaire. À mon avis, la question au sens plus large est « qu’est-ce qui relève de l’assurance maladie et qu’est-ce qui n’en relève pas? ». Problème épineux. Comment rationner des services publics? Au Canada, nous le faisons en esquivant la discussion. Nous sommes passés à un système populiste, comme aux États-Unis.

4)    JOHN G. ABBOTT, chef de la direction, Conseil canadien de la santé : Comment l’Obamacare se raccorde-t-il au déficit américain, et quelles sont les comparaisons avec le Canada?

TRUDY LIEBERMAN : L’Obamacare ne casse pas la tirelire, en lui-même. En définitive, les opposants à l’Obamacare veulent traiter de l’admissibilité à l’assurance maladie et de sa privatisation – comme pour l’assurance-médicaments. La population est d’accord avec le fait que les citoyens mieux nantis paient davantage pour les soins de santé, mais quelle est la définition de « bien nanti »? Ce point préoccupe ceux qui soutiennent l’assurance maladie, et il s’agit d’un énorme problème. L’autre point renferme le droit aux prestations et la sécurité sociale. Beaucoup veulent la privatiser. Mais le coût d’une formule évolutive risque de changer afin de réduire le montant des dépenses pour le gouvernement, ce qui nuira aux foyers à faible revenu, surtout les femmes. Les subventions à long terme prévues par l’Obamacare entreront ensuite en jeu. Elles sont financées pour une période de 10 ans, mais nous ne savons pas si elles seront assurées à long terme. En somme, elles connaîtraient le même sort que l’assurance maladie, quel qu’il soit.

5)    COMMENTAIRE SUR LES COÛTS HOSPITALIERS

TRUDY LIEBERMAN : Rien, dans l’Affordable Care Act, n’exige que les prix ou les services soient négociés. Les hôpitaux affichent des prix « de détail », habituellement assez élevés. Mais ils sont très différents d’un hôpital à l’autre, même au sein d’une même collectivité. Cependant, ces prix sont en grande partie fictifs. [quelqu’un de l’auditoire : « Ils sont destinés aux Canadiens qui viennent se faire soigner » – rires]. En pratique, les hôpitaux négocient avec les assureurs et s’entendent sur beaucoup moins que les coûts affichés. De nombreux réseaux hospitaliers prennent de l’expansion et deviennent des conglomérats qui entrent en concurrence les uns avec les autres. Ils mettent en valeur le fait qu’ils disposent du meilleur équipement ou des meilleurs soins cardiaques, mais ne parlent pas du prix. On craint réellement que ces conglomérats détiennent un jour suffisamment de pouvoir pour fixer les prix sans grande concurrence ou réaction de la part du gouvernement.

ANDRÉ PICARD : Les Canadiens ignorent les coûts réels des soins de santé. Ils sont excessifs. Nous avons un système comparable à celui des États-Unis.

TRUDY LIEBERMAN : L’article de Brill sur les soins de santé, paru dans Time Magazine, était vraiment bien écrit.
Il faut plus de transparence.

Fin du déjeuner avec les chefs.

22 octobre 2013

Un rôle pour les médecins au sein de la réforme en santé

Sophia Harrison est étudiante de première année en médecine à l’Université de Northern British Columbia. Une des lauréates du Défi de l’innovation en santé, elle a bénéficié d’un stage d’été au sein du Conseil canadien de la santé.

Quel rôle peuvent jouer les médecins dans la réforme des soins de santé? Cette question me trotte dans la tête depuis que j’ai terminé mon stage d’été au Conseil canadien de la santé et que je suis entré en première année de médecine.

Dans le cadre de mon travail au Conseil canadien de la santé, j’ai appris que les Accords sur la santé de 2003 et de 2004 n’ont pas amené les changements profonds promis par les politiciens. Notre système de santé accuse plutôt un énorme retard à répondre aux besoins d’une population vieillissante et diversifiée et se classe constamment en milieu de peloton parmi les pays où les revenus sont élevés. Après s’être penché sur une décennie de réformes en matière de soins de santé, le Conseil, dans son rapport de septembre 2013 intitulé Meilleure santé, meilleurs soins, meilleure valeur pour tous, demande une approche unifiée pour cette réforme, laquelle ferait appel à un leadership dynamique du gouvernement fédéral et à une collaboration des provinces. En plus d’un leadership politique solide, je crois que les médecins ont un rôle important à jouer pour faire pression au nom du grand public afin que le système de santé soit amélioré.  

Les omnipraticiens sont aux premières lignes dans notre système de santé et sont formés dans un large éventail de spécialités. En une seule journée, un omnipraticien peut traiter une vaste gamme de maladies, des troubles aigus aux problèmes de santé chroniques, en plus d’offrir des soins préventifs et de l’éducation à la santé. La relation qu’entretient l’omnipraticien avec ses patients est fondamentale dans le cadre de sa pratique et est essentielle à la prestation de soins de qualité pour le diagnostic et le traitement des maladies. Une relation solide repose sur la confiance, le respect mutuel et la responsabilité de chacun.

Cette solidité de la relation médecin-patient fait en sorte que le public respecte habituellement le jugement des omnipraticiens, et ce, même en dehors de la médecine clinique. Les médecins qui choisissent de traiter leurs patients en tant que personne et en tant que population peuvent profiter de leur statut pour faire pression afin que des changements soient apportés sur le plan politique. Si le mandat d’un médecin consiste à aider les malades, celui-ci a d’autant plus intérêt à faire pression pour une plus grande collaboration et davantage de travail en équipe, pour de nouveaux moyens de réfléchir et d’apprendre, et pour participer plus activement à la planification des soins de santé, à l’établissement de priorités, à l’élaboration de stratégies et à des soins axés sur le patient.

Il appartient à chaque médecin de définir son propre rôle. Alors que mes collègues et moi nous dirigeons vers cette nouvelle carrière, nous jetons les bases de ce que seront les omnipraticiens de demain. Mon expérience au Conseil canadien de la santé m’a fait réaliser l’importance de comprendre les politiques qui ont des répercussions sur les soins de santé et l’efficacité, quand on parle de résultats pour la santé, du changement et de l’innovation à l’échelle du système. Pendant ma formation, je m’engage à continuer de participer activement et à investir de l’énergie pour l’amélioration du système de santé dont nous faisons tous partie. Et je suis convaincu que je ne suis pas le seul à prendre un tel engagement.

16 octobre 2013

Temps à libérer le potentiel des poches de l'innovation


Dr Dennis Kendel est membre du Conseil d'administration de la Saskatchewan Health Quality Council et est un conseiller auprès du Conseil Canadien de la santé.  

Au Canada, les occasions de faire le point sur l’amélioration de la qualité des soins de santé, la sécurité des patients, la présentation de rapports destinés au public et l’innovation ne manquent pas. Mais alors, qu’est-ce qui rend unique le symposium du Conseil canadien de la santé qui se tiendra à Toronto les 29 et 30 octobre? C’est le fait qu’on pourra discuter de tous ces sujets au même endroit.

Plus d’une décennie s’est écoulée depuis que la Saskatchewan a créé le premier conseil en matière de qualité de la santé au Canada. Six autres provinces ont par la suite mis sur pied des agences qui se consacrent exclusivement à la surveillance et à l’amélioration de la sécurité et de la qualité des soins de santé. Jusqu’à maintenant, aucune agence au Canada n’avait rassemblé les sept agences dans un seul forum afin de comparer ses stratégies d’amélioration de la qualité avec les autres, de discuter ouvertement des réalisations et des défis permanents auxquels elle fait face et d’évaluer les perspectives d’une collaboration intergouvernementale accrue.
Dans le cadre de notre symposium, nous pourrons apprendre entre autres ce que les efforts de l’agence National Health Performance Authority en matière d’amélioration de la qualité et de l’efficacité des soins de santé ont donné de positif en Australie, un pays auquel nous nous comparons souvent.

De plus, l’Institut canadien d’information sur la santé viendra nous entretenir de ses plans d’avenir visant à mesurer de manière plus rigoureuse le rendement du système de santé au Canada et à mieux communiquer ce rendement au public.
Nous aurons aussi la chance de participer à une conversation avec Ross Baker à propos du renforcement de la capacité du système à améliorer la qualité.

Au cours de la dernière décennie, j’ai eu la chance extraordinaire de constater de mes propres yeux certaines améliorations à petite échelle stupéfiantes ayant trait à la qualité des soins de santé dans ce pays. Toutefois, jusqu’à récemment, j’étais déçu du bilan global du Canada, qui n’affichait aucun changement profond, peu importe la province ou le territoire. En tant que membre du Conseil de la qualité de la santé de la Saskatchewan, je crois que nous sommes aujourd’hui à la veille d’une transformation véritable et je me réjouis de la présence de Bonnie Brossart au symposium du Conseil de la santé, qui communiquera à la nation des renseignements précieux tirés de notre expérience des trois dernières années en Saskatchewan.

À titre de conseiller du Conseil canadien de la santé, je suis aussi grandement impressionné par l’éventail des innovations en matière de soins de santé partout au pays, qui sont maintenant à la portée de tous les Canadiens grâce au Portail de l’innovation en santé du Conseil de la santé.
De mon point de vue, notre défi à tous, au Canada, consiste à mettre en pratique tout ce que nous avons appris des « foyers » d’innovation à la grandeur du pays afin que nos soins de santé futurs soient les meilleurs parmi tous les pays de l’OCDE.

L’inspiration, l’énergie et le leadership engagé, essentiels à la réalisation de cet objectif, pourraient émerger des conversations capitales qui auront lieu au Symposium national sur l’amélioration de la qualité du Conseil de la santé à Toronto les 29 et 30 octobre. Ne ratez pas l’occasion d’y participer!
J’espère vous voir à Toronto à la fin d’octobre. Si vous ne pouvez pas assister au symposium, surveillez la publication du compte rendu des consultations, qui sera mis en circulation en décembre.

denniskendel@gmail.com

3 octobre 2013

Initiative pour les soins chirurgicaux de la Saskatchewan – Plus rapides, plus sûrs et plus intelligents

Mark Wyatt est sous-ministre adjoint au ministère de la Santé et ancien directeur général de l’Initiative pour les soins chirurgicaux de la Saskatchewan.

Trois sur quatre.

Voilà une façon simplifiée de décrire l’engagement qu’a pris le gouvernement de la Saskatchewan au printemps de 2010 selon lequel tous les patients pourraient subir leur chirurgie dans les trois mois après leur inscription sur la liste d’attente. Le gouvernement s’est donné quatre ans pour remplir cet engagement, dont l’échéance est fixée au 31 mars 2014.

Pour une province qui affichait des temps d’attente en chirurgie parmi les plus longs au pays, il s’agissait là d’un objectif auquel le temps accordé, pour certains, n’avait aucun bon sens. Les sceptiques et les convaincus ont tout de même entrepris cette course ensemble en sachant qu’il n’y avait pas d’autre solution. Les patients avaient parlé, comme en fait foi un examen détaillé du système de santé de la province effectué selon leur point de vue.

Ainsi, on a créé une coalition formée de patients, de fournisseurs de soins et de dirigeants de l’ensemble du système de santé, sans oublier plusieurs vétérans des forces anti-listes d’attente. Le message était clair : l’accès aux soins est important, certes, mais pas moins que leur qualité, leur sûreté et la compassion avec laquelle ils doivent être prodigués aux patients. De toute façon, il est impossible d’atteindre des objectifs durables en matière d’accès sans tenir compte des facteurs de qualité et de sécurité. Mais il ne faut pas se borner à la salle d’opération, car les solutions pour transformer l’expérience vécue dans le cadre d’une intervention chirurgicale se trouvent également en amont et en aval. Ces sages propos ont servi de ligne de départ à la course et en ont inspiré la devise Plus rapides, plus sûrs et plus intelligents.

Retour à l’automne 2013. Comme nous approchons des six derniers mois de ce périple de quatre ans, les résultats et les leçons de l’innovation dans le système de santé deviennent manifestes. En effet, l’initiative a suscité d’immenses succès et aussi quelques, euh... « travaux en cours », appelons les comme ça.

À six mois de la fin de l’initiative, donc, notre objectif en matière d’accès n’est plus très loin. À l’échelle de la province, 80 % des patients obtiennent leur chirurgie dans les trois mois, et 91 % d’entre eux l’obtiennent dans les six mois. Nous nous attendons à ce que la plupart des régions atteignent une norme de trois mois d’ici mars 2014. Il est à noter que la région Qu’Appelle de Régina, dont les temps d’attente sont partis dans la mauvaise direction avant que l’on renverse la vapeur en 2013, aura besoin d’une année supplémentaire. Le fait d’avoir établi un objectif ambitieux a contribué à ce que l’état d’esprit collectif se ravive, et que, des progrès graduels habituels, on passe à des actions et à des résultats spectaculaires. Lorsque nous arriverons à notre destination finale, en cinq ans au lieu de quatre, toutefois, je m’attends à ce que la majorité des patients accueillent le résultat avec plaisir. Un engagement mou où l’on ne ferait qu’espérer une amélioration de la situation n’est pas envisageable.

Sur le plan de la qualité et de la sécurité, notre mise en œuvre de la liste de vérification des chirurgies sécuritaires a très bien fonctionné (selon nos dernières données, 96 % de succès à l’échelle provinciale), et nos progrès ne cessent de croître en matière de conciliation médicamenteuse au moment de l’admission (84 %). La révolution en matière d’amélioration de la qualité selon la méthode LEAN en cours en Saskatchewan crée des avantages concrets pour ce qui est des soins prodigués, du roulement des patients et de la prévention des préjudices. La centralisation des dossiers des patients et les parcours pour les patients ouvrent pour leur part la voie aux évaluations et aux traitements en temps opportun. Et ceci n’est que l’effleurement du potentiel des aspects plus sûrs et plus intelligents des soins chirurgicaux.


Même si de prodigieuses améliorations ont été réalisées, le prochain défi sera de travailler comme un seul corps pour consolider nos acquis et poursuivre nos améliorations. L’Initiative pour les soins chirurgicaux de la Saskatchewan montre les possibilités d’un groupement de gens dévoués autour d’une vision commune et d’un objectif ambitieux; elle montre aussi comment, si on leur laisse le champ libre, ces gens font bouger les choses. Pour en savoir plus, visitez le www.sasksurgery.ca.

* CLIQUEZ ICI pour voir la vidéo mettant en vedette Mark Wyatt et ses collègues, où l’on constate comment l’Initiative pour les soins chirurgicaux de la Saskatchewan a permis de réduire les temps d’attente en chirurgie.

BASE : un système qui change la communication entre médecins de soins primaires et médecins spécialistes



Dre Erin Keely occupe le poste de chef à la Division d'endocrinologie et de métabolisme de l'Hôpital d'Ottawa; elle est également professeure au département de médecine et d'obstétrique ainsi qu'au département de gynécologie à l'Université d'Ottawa.

Au Canada, le temps d'attente lié aux soins spécialisés demeure la plus grande barrière à l'accessibilité des soins de santé. Des périodes d'attente interminables, des soins mal coordonnés, une communication déficiente et des dédoublements de tests peuvent perturber sérieusement la transition des soins, se traduire en traitements inappropriés, provoquer l'insatisfaction des patients et même présenter un risque pour la santé.

Le projet Champlain BASE (Accroître l'accès aux spécialistes par la voie de la consultation électronique) a été conçu pour simplifier et accélérer l'accès des fournisseurs de soins primaires à l'expertise des médecins spécialistes dans le but d'améliorer la prestation des soins aux patients.

Le service de consultation électronique est un système Web sécurisé grâce auquel les fournisseurs de soins primaires soumettent des questions aux spécialistes. Ils peuvent joindre aux demandes d'aiguillage des renseignements supplémentaires sur les patients tels que des résultats de tests de laboratoire, des images numériques et des antécédents médicaux; ainsi, ils éliminent la nécessité de répéter des tests parfois coûteux ou douloureux. Normalement, les fournisseurs de soins primaires reçoivent une réponse de la part des spécialistes en trois jours, ce qui contraste avec les nombreux mois que doivent parfois attendre les patients avant d'obtenir un rendez‑vous avec un ou une spécialiste. Qui plus est, puisqu'il les incite à discuter directement des dossiers, le système permet d'améliorer la communication et la relation entre les médecins de soins primaires et les médecins spécialistes.
Dre Jennifer Ozard

À l'heure actuelle, environ 25 % des fournisseurs de soins primaires et des spécialistes de 26 domaines différents se servent de la plateforme électronique, laquelle a fait l'objet de plus de 1 300 consultations. Sans l'existence de ce système, 40 % de ces consultations se seraient traduites par des visites de patients en personne dans les bureaux des spécialistes. Il est à noter que ces derniers, dans la plupart des cas, ont donné leurs consultations électroniques en moins de dix minutes!

Notre service de consultation électronique convivial est susceptible de réduire sensiblement les temps d'attente, car il aidera les fournisseurs de soins primaires à obtenir plus facilement l'avis des spécialistes sans avoir à diriger leurs patients en personne. Toutefois, si l'on veut appuyer la consultation électronique et lui faire prendre de l'expansion pour qu'elle demeure une solution durable aux longs temps d'attente, il faut revoir le barème d'honoraires des médecins et y inclure des codes de frais associés aux consultations électroniques.

*CLIQUEZ ICI pour voir la vidéo mettant en vedette la Dre Keely et ses collègues, où l'on voit comment le projet Champlain BASE a amélioré la communication entre médecins de soins primaires et médecins spécialistes.

1 octobre 2013

Allons continuer la conversation


Shilpi Majumder, Ph. D., Chef des politiques, Le Conseil canadien de la santé
Les Canadiens parlent de notre rapport, Meilleure santé, meilleurs soins, meilleure valeur pour tous : Recentrer la réforme des soins de santé au Canada, que nous avons publié le 19 septembre 2013. Notre président, le Dr Jack Kitts, a parlé à l’Economic Club of Canada du rapport en soulignant la nécessité d’harmoniser les activités du système de santé afin d’obtenir des objectifs équilibrés soutenus par les catalyseurs principaux (leadership, politiques et lois, renforcement des capacités, innovation et diffusion, mesure et rapports). Ce rapport a suscité un vif intérêt et de nombreuses questions qui ont été saisies et mises en ondes par la chaîne des affaires publiques par câble à Ottawa. Par ailleurs, les sources médiatiques suivantes ont mentionné le rapport, et divers organismes de santé ont appuyé notre travail en publiant leurs propres communiqués de presse ou en affichant des commentaires en ligne :  

·              Le Globe and Mail s’est penché sur les déceptions qu’ont suscitées les réformes de santé au cours de la dernière décennie par l’entremise d’un article de David Andreatta du 19 septembre et d’un article de Jeffery Simpson du 20 septembre. Les deux articles ont généré de grandes conversations en ligne.

·              Un article publié dans iPOLITICS a réitéré les conclusions du rapport, et la porte-parole du NPD en matière de santé, Libby Davies, a appuyé les messages en disant que le gouvernement fédéral « devait retourner à la table des négociations ».

·              Un éditorial du Dr Kitts a été publié dans l’Ottawa Citizen du 19 septembre 2013.

·              Un essai de notre chef de direction, John G. Abbott, présentant les répercussions du rapport, a été publié dans le site Web Longwoods.

·              Des entrevues avec CBC Radio Canada International et des radiodiffuseurs régionaux ont suivi.

·              L’émission Power Play de CTV, avec Don Martin, a mentionné les conclusions du rapport.

·              Par ailleurs, le rapport a motivé de nombreux lecteurs à consulter notre blogue.  

·              Ce rapport a également reçu l’appui des organismes suivants :





o   ehospice

On nous pose continuellement la question suivante : Si le Conseil de la santé n’était pas là, qui ferait l’appel à l’action et la mise en place de l’approche proposée?

Nous percevons l’approche que nous préconisons pour transformer le système – objectifs équilibrés soutenus par les catalyseurs – comme une méthode que tous les systèmes de santé, qu’ils soient gérés par une province, une région ou un organisme – peuvent adopter comme vision globale. Nous espérons en même temps que, grâce au leadership fédéral et à la collaboration de l’ensemble des provinces et des territoires, ce rapport sera une source de motivation pour transformer le système de santé dans le cadre d’une approche nationale.

Mes collègues et moi-même avons consacré énormément d’efforts à la rédaction de ce rapport, et nous sommes heureux de voir le vif intérêt et les réactions positives qu’il suscite. Je tiens à remercier tous ceux qui ont participé à ce rapport de leur excellent travail, ainsi que tous les réviseurs externes qui nous ont fourni de précieux commentaires.

Nous invitons la population canadienne à nous faire part des expériences qu’elle a vécues en matière de soins de santé au cours de la dernière décennie et de la façon dont elle aimerait que la santé et les soins de santé changent.   

Nous encourageons les leaders des systèmes de santé à poursuivre la conversation. Dites-nous comment les travaux de votre organisme s’harmonisent avec l’approche que nous préconisons, et s’il existe des lacunes importantes.