Mme Debra Lynkowski, chef de la direction, Association canadienne de santé publique.
L'Association canadienne de santé publique (ACSP) félicite le Conseil canadien de la santé pour la publication de cet important rapport qui fait état de la nécessité d'un effort national intersectoriel sur plusieurs fronts pour s'attaquer aux déterminants de la santé comme moyen d'atteindre la santé pour tous au Canada.
Lors de l'ouverture de la séance plénière de la conférence de 2008 de l'ACSP, le Professeur Michael Marmot nous a rappelé que tous les ministres du gouvernement sont des ministres de la Santé. Nous avons parlé des déterminants de la santé durant trois décennies. L'ACSP et de nombreuses autres associations professionnelles, organismes non gouvernementaux et groupes du secteur de la santé ont vivement recommandé des investissements dans les enjeux en santé de la population qui se situent en amont. Il y a maintenant de plus en plus de preuves concluantes qui viennent étayer la thèse des investissements dans une approche par déterminants de la santé pour régler la question de l'équité en santé. C'est le cas notamment d'une récente étude réalisée au Manitoba et qui est mentionnée dans le rapport du Conseil canadien de la santé, et de données provenant de nombreux autres pays.
Comme le soulignait le sous-comité sénatorial des affaires sociales, des sciences et de la technologie dans son rapport très remarqué déposé en 2009, le Canada est bien loin d'où il devrait se situer pour ce qui est de l'état de santé de sa population. Cela est particulièrement vrai pour les Autochtones, pour de nombreux sous-groupes vivant en régions rurales ou éloignées et pour les personnes qui se situent dans les couches socioéconomiques inférieures des grands centres urbains. Un leadership du gouvernement fédéral est essentiel pour donner le coup d'envoi au plan de travail national d'une stratégie pancanadienne pour la santé de la population. Les deux premières recommandations de ce rapport exposent clairement ce qui constituerait les fondements de cet effort national : que le premier ministre prenne les devants pour annoncer, élaborer et mettre en œuvre une politique pour la santé de la population au niveau fédéral en mettant en place et en présidant un comité du Cabinet sur la santé de la population et que le premier ministre convoque une rencontre avec les premiers ministres de provinces et des territoires en vue d'établir un mécanisme intergouvernemental de collaboration dans le cadre d'une stratégie pancanadienne pour la santé de la population.
Cette année a été marquée par un moment historique aux États-Unis, alors que le Congrès adoptait l'Affordable Care Act, la loi pour des soins de santé abordables. Cette Loi, qui passera à l'histoire, comprend des dispositions claires et complètes relatives à prévention, notamment avec des sommes allouées à la promotion de la santé et du bien-être. Elle s'attaque à la fragmentation des politiques et des mesures et au manque de coordination entre les organismes locaux, municipaux, fédéraux et d'État grâce à deux initiatives. La première est la mise sur pied du National Prevention, Health Promotion and Public Health Council (conseil national de prévention, de promotion de la santé et de santé publique). Présidé par le Surgeon General des États-Unis, le mandat de ce conseil consistera à coordonner et à mettre en œuvre le plan de travail national en matière de prévention. La deuxième initiative est la création du Prevention and Public Health Fund (fonds de prévention et de santé publique) mis sur pied pour investir dans les programmes de prévention et de santé publique visant à améliorer les résultats en santé et à réduire les coûts des soins de santé. S'il nous arrive souvent de critiquer les États-Unis parce qu'ils n'assurent pas un accès à des soins et à des services de santé de base à des millions de leurs citoyens, nous devrions peut-être nous pencher sur les dispositions de la nouvelle loi sur la réforme de la santé et en apprécier certains des aspects les plus progressistes, particulièrement en ce qui concerne la santé publique.
Au cours des dernières décennies, l'ACSP a constamment demandé que soit adoptée une approche en santé publique et santé de la population ici même au Canada. Notre association appuie énergiquement toutes les recommandations du rapport du sous-comité sénatorial. Nous avons écrit au premier ministre et l'avons pressé d'assurer un rôle de leadership dans la mise en place d'un processus qui déboucherait sur la création d'une stratégie pancanadienne en santé de la population.
Compte tenu de l'importance du revenu, de l'emploi, de la sécurité d'emploi, du logement, de l'éducation, de la sécurité alimentaire et du développement de la petite enfance, l'ACSP avait demandé au gouvernement du Canada, dans son budget de 2009, de créer un fonds spécial pour appuyer les initiatives qui visent à agir sur les déterminants sociaux de la santé. L'ACSP avait alors suggéré un investissement initial de 60 millions $, ce qui équivalait à environ 10 % du budget annuel de l'ASPC. Ce fonds, qui serait administré par l'Agence, serait réparti de façon à appuyer des initiatives à l'échelle nationale, provinciale ou territoriale et locale.
À maintes reprises, l'ACSP a pressé le gouvernement fédéral d'envisager la mise sur pied d'un nouveau mécanisme de financement en santé publique, compte tenu du fait que cet aspect n'est pas couvert par la Loi canadienne sur la santé et que les services de santé publique ne sont pas officiellement pris en compte par le Transfert canadien en matière de santé (TCS). Compte tenu de l'insuffisance des fonds destinés à la santé publique dans le TCS, l'ACSP avait recommandé, dans son document d'information budgétaire au ministère des Finances, la création d'un Fonds national pour l'infrastructure de la santé publique de 1 milliard $ sur trois ans. L'objectif de ce fonds serait d'aider les unités de santé publique de partout au pays à déployer les programmes nécessaires pour répondre aux besoins actuels des populations qui forment leur clientèle. Ce fonds servirait aussi à soutenir les initiatives nationales, provinciales/territoriales et locales de promotion de la santé et de prévention liées aux déterminants sociaux de la santé. Comme le soulignait la firme Informetrica, des investissements de 1 milliard $ en services de santé pourraient multiplier le PIB par un facteur de 1,8 et créer près de 18 000 emplois.
Le Canada ne peut pas ignorer le fait que notre pays fait face à une situation très grave pour ce qui est des inégalités en santé entre les divers groupes de sa population. La santé publique est un bien commun. Le gouvernement fédéral a l'obligation et la responsabilité d'assurer le leadership national qui assurera l'égalité en matière de santé pour tous les Canadiens. Investir en santé publique est vital, que ce soit dans le cadre du soutien de base offert par l'Agence de la santé publique du Canada, par le paiement de transferts aux provinces et aux territoires comprenant des crédits affectés au soutien de fonctions et de programmes en santé publique, ou par des mécanismes qui permettront d'accroître les sommes disponibles pour répondre aux besoins essentiels, protéger et améliorer la santé et le bien-être des Canadiens. L'objectif de la santé pour tous est atteignable. Comme le soulignait la Commission de l'OMS, il nous faut « instaurer l'équité en santé en l'espace d'une génération; il le faut et c'est maintenant qu'il faut agir ». Ensemble, nous pourrons faire la différence et le moment est venu de le démontrer.
Mots Clés: Promotion de la santé
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