Pour le lancement de notre rapport sur la santé maternelle et infantile chez les Autochtones, notre chef de la direction, John G. Abbott, a écrit un éditorial intitulé << Qu’est-ce qui fait une différence dans la santé des Autochtones?>> Ce qui suit est l’éditorial au complet que nous avons également diffusé aux médias à travers le pays.
Les Canadiens sont nombreux à savoir que les Premières nations, les Inuits et les Métis ont une santé nettement plus précaire et des conditions de vie plus rudes que la population canadienne en général. En 2010, le Conseil canadien de la santé a entrepris un projet pluriannuel pour en savoir plus sur les programmes et les stratégies susceptibles d’atténuer ces inacceptables disparités entre la santé des Autochtones et celle des non-Autochtones du Canada.
En janvier et en février 2011, le Conseil canadien de la santé a tenu une série de sept séances régionales réunissant travailleurs de première ligne, représentants gouvernementaux, chercheurs et autres pour déceler les programmes et les services qui favorisent une amélioration des soins dispensés aux femmes enceintes et aux jeunes enfants autochtones. Si chaque région a présenté ses sujets et ses programmes particuliers, les conversations comportaient des fils communs à travers le pays.
Le 9 août, nous avons publié un rapport sur les propos entendus dans un document intitulé Comprendre et améliorer la santé maternelle et infantile chez les Autochtones au Canada, à l’intention des Canadiens et des gouvernements. J’aimerais mettre en évidence trois importants thèmes de ce document.
Tout d’abord, imbriquée dans quantité de modèles à suivre, se trouvait l’importance de restituer les fragments extirpés aux Autochtones, comme la connaissance de leur langue et de leurs traditions, la fierté à l’égard de leur culture et l’autodétermination. Les participants se sont montrés inquiets du fait que beaucoup de Canadiens non autochtones — dont ceux qui travaillent dans le domaine de la santé, les services de garderie et les bureaux gouvernementaux — ne comprennent tout simplement pas la vision du monde des Autochtones ou n’y accordent aucune importance, et ne saisissent pas les effets qu’ont eus sur toute la culture les expériences de colonialisme et les pensionnats, qu’ont connues plusieurs générations. On nous a rappelé l’importance d’offrir des services de santé qui allient la médecine occidentale conventionnelle et les pratiques traditionnelles autochtones, adaptées à cette culture. Les travailleurs de première ligne nous ont dit qu’un passé de traitement paternaliste et de racisme, couplé à un manque continu de compréhension, a engendré un sentiment de méfiance chez les mères autochtones qu’ils servent. Elles appréhendent la consultation de professionnels de la santé par crainte de racisme ou du jugement à l’égard de leur manque de connaissances ou de leur comportement. Elles hésiteront à revenir si elles ne reçoivent pas un traitement adapté.
Puis, un certain nombre de programmes efficaces ont dû déborder de leur champ de services de soins habituels pour aider des femmes et des familles autochtones dans d’autres facettes de leur vie, comme le logement, le soutien social ou affectif et l’éducation. On a mentionné dans chaque séance régionale l’importance de l’éducation — surtout les cours prénataux, le soutien aux nouveaux parents et les programmes préscolaires. Ces interventions précoces permettent de jeter les bases d’une meilleure santé physique et émotionnelle la vie durant. Les participants ont aussi parlé des éléments sous-jacents de la santé autochtone — des facteurs comme la pauvreté, les dépendances, la violence familiale, la mauvaise estime de soi et les séquelles intergénérationnelles de la colonisation et des pensionnats. Selon eux, améliorer la santé des Autochtones demande une plus grande ouverture d’esprit et une approche plus holistique. Des changements positifs visant ces facteurs sont observés dans quelques communautés, provinces et territoires, mais les efforts fructueux sont exaspérants et frustrants pour ceux qui habitent des régions où les changements mettent plus de temps à s’installer.
Troisième point soulevé par les participants : les politiques, la bureaucratie et le manque de fonds entravent leurs efforts d’amélioration. Selon eux, il existe une foule de programmes et de stratégies efficaces pour améliorer la santé des femmes enceintes et des jeunes enfants, mais ils sont souvent instables ou sans financement pluriannuel ou fonds suffisants pour combler les besoins de la population servie. Les participants ajoutent que les gouvernements lancent de nombreux programmes adaptés aux besoins des Autochtones, dont le financement cesse en entraînant la perte de quantité de gains. Ils se disent frustrés que priorités et financement suivent la vague des programmes politiques et des changements de gouvernement; un bon programme est parfois abandonné, réoutillé et repris quelques années plus tard. Certains participants ont dit souhaiter que les gouvernements comprennent que les nouveaux programmes demandent du temps à « mûrir » et jusqu’à une génération avant d’afficher des preuves d’efficacité. De plus, les demandes et les ententes de financement sont souvent compliquées et rigides. Les travailleurs de première ligne s’épuisent à tenter d’exécuter les programmes nonobstant ces complications.
Les participants étaient malgré tout enthousiastes à l’égard d’un grand nombre de stratégies et de programmes prometteurs dont l’influence sur la vie des femmes enceintes et des jeunes enfants autochtones est apparente. Alors que les gouvernements mettent les relations avec les Autochtones en perspective, nous les encourageons à miser sur les réussites actuelles en matière de santé maternelle et infantile en prolongeant les programmes clairement efficaces et en les accompagnant d’ententes de financement à long terme simplifiées.
En tant que pays envié dans le monde, nous devons mieux traiter nos mères et nos enfants autochtones — par égard pour eux comme pour nous.
Mots Clés: Santé des Autochtones
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