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25 janvier 2013

Nous devons sortir de notre bulle


Jason Nickerson est inhalothérapeute et candidat au doctorat en santé de la population, à l’Université d’Ottawa.

En raison du besoin de renforcer la capacité de notre système de soins de santé primaires, il est extrêmement important pour nous de porter attention aux points de vue de ceux qui travaillent au sein de ce système. La publication du rapport Comment les médecins canadiens de soins primaires classent-ils le système de soins de santé? nous offre cette possibilité. Ce rapport devrait signaler la nécessité pour nous d’évoluer non seulement sur le plan des discussions, mais aussi sur celui des innovations, afin de déterminer comment continuer de rentabiliser les fonds consacrés aux soins de santé pour les Canadiens.

Depuis des décennies, les spécialistes des politiques de santé et les praticiens canadiens sont aux prises avec cette question : comment améliorer l’accès aux soins de santé primaires pour les Canadiens? Le débat s’est tenu dans le contexte d’un système de santé fracturé et fragmenté, qu’il est bien évidemment difficile de considérer comme un système national. En fait, des soins de santé de qualité sont souvent prodigués mais dans des bulles isolées, dont la plupart ne sont pas reliées d’une manière pragmatique aisément navigable pour les patients et les prestateurs de soins. Pour être efficace, un système de santé doit comporter des liens transparents entre les prestateurs de soins communautaires, de soins primaires, de soins intensifs et de soins continus – chose qui manque au Canada, selon ce rapport. Nous devons concentrer davantage nos efforts sur les systèmes, et non pas sur les problèmes individuels.

Malheureusement, les progrès sont terriblement lents. Comme le rapport le souligne :
« Le Canada fait piètre figure au classement comparativement aux autres pays, pour plusieurs facteurs liés à l’accès aux soins de santé et à la coordination des soins entre les prestateurs de soins primaires et les spécialistes. » Le problème n’est pas nouveau et il ne provient pas d’un manque d’investissement. En effet, un nombre considérable de projets et d’autres modèles de pratique ont vu le jour partout au Canada, dont certains ont remporté un grand succès, mais dont beaucoup n’ont pas pu évoluer au-delà du contexte médical où ils étaient nés.

Nous devons comprendre qu’il faut remédier aux nombreuses contraintes sur le plan de l’accès aux soins de santé en faisant des réformes structurelles considérables de gouvernance et d’organisation des systèmes de santé au Canada (car il y a pluralité des systèmes, et non pas un seul système cohérent). Beaucoup trop peu de cliniciens peuvent exercer pleinement dans l’éventail complet de leurs compétences, ce qui limite « la rentabilisation maximale » de leur formation et de leur déploiement; les réseaux et les procédures efficaces d’aiguillage sont absents de trop nombreux systèmes, ou sont freinés par des contraintes d’administration et de procédure qui compliquent l’orientation et la collaboration; des systèmes d’information sur la santé ont été déployés pour recueillir de vastes quantités de données, mais bien souvent, ils ne parviennent pas à gérer ces données de manière significative entre les différents prestateurs et systèmes de soins.

Beaucoup de choses ont été écrites à propos du besoin d’améliorer le système de santé au Canada, mais nous devons aller au-delà des solutions simplistes qui consistent en grande partie à viser les changements, plutôt que les réformes. Des propositions comme l’éducation interprofessionnelle ou les dossiers électroniques présentent clairement un potentiel d’apporter ces changements, mais s’avèrent insuffisantes pour éliminer les obstacles de structure, de réglementation ou d’institution qui nuisent à l’application optimale des innovations. Les cliniciens qui n’ont pas le pouvoir d’entreprendre, de prescrire ou de cesser des traitements, ou d’orienter leurs patients vers des collègues de professions différentes (ou qui ne sont pas autorisés à le faire), peuvent difficilement prodiguer des soins interprofessionnels optimaux, ou voir les avantages d’une éducation interprofessionnelle. Les systèmes informatisés d’information et d’imagerie médicales qui ne permettent pas un transfert efficace des dossiers entre les différentes instances de soins de santé, ou entre les différentes cliniques, ne sont d’aucune utilité pour les patients ou pour les systèmes de santé. De plus, les cliniciens de première ligne déterminent les inefficacités et les lacunes de ces systèmes et trouvent des moyens de les contourner, ce qui peut directement saper les investissements effectués.

Un travail considérable reste à accomplir pour que les systèmes de soins primaires au Canada continuent de se classer parmi les meilleurs au monde. Toutefois, ceci ne peut pas se faire sans des réformes coordonnées visant à relier les innovations et à garantir l’évolution constructive de la prestation des soins de santé au Canada. Actuellement, il y a des poches d’innovation et d’excellence, ici et là, et la tâche qui nous attend consiste à renforcer de manière coordonnée les systèmes contemporains axés sur la prévention, le traitement et la responsabilisation.

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