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2 juin 2011

Lignes de faille dans le socle des soins de santé


Pamela C. Fralick, blogueuse invitée, a joint l’Association canadienne des soins de santé en tant que présidente et chef de la direction en février 2008. Elle est aussi coprésidente du Groupe d’intervention action santé, une coalition de 37 associations et organisations nationales de la santé, coprésidente de la Coalition canadienne pour la santé publique au 21e siècle et présidente de la Coalition pour la qualité de vie au travail et des soins de santé de qualité.

Je voudrais commencer par la fin. Ce rapport conclut : « ... la prochaine vague d’efforts devra amener tous les gouvernements à œuvrer de concert, dans l’intérêt de tous les Canadiens, comme les accords en ont vraiment fait la promesse ». Et c’est là que le bât blesse…

Je me suis sentie envahie d’une frustration grandissante à lire une suite de pages appelant à « l’optimisme, mais… ». Autrement dit, oui, il y a des progrès, mais sous la forme d’une mosaïque, ce qui amène deux problèmes importants : 1) l’amélioration des résultats de santé découlant des changements reste difficile à évaluer, et 2) l’application inégale des changements à l’échelle du pays met en cause une valeur et une condition essentielles sur lesquelles se fonde notre système de santé : l’universalité.  

Revenons maintenant au début, pour présenter quelques observations.

Premièrement, de quelle bravoure doit-on (malheureusement) faire preuve pour adopter la transparence que ce public d’agitateurs réclame de plus en plus! Mais, en fait, la promesse faite en 2003 et en 2004 par les gouvernements canadiens de faire rapport sur leurs progrès relativement à des réformes substantielles du système de santé est vraisemblablement sans précédent et doit être saluée.

Deuxièmement, ce rapport du Conseil a parfaitement réussi à faire la synthèse d’une incroyable quantité de documents, recueillis auprès d’une multitude de sources, et à en tirer, dans un langage clair, un résumé bien organisé et facile à utiliser. Il s’appuie solidement sur les données scientifiques, et le lecteur qui voudrait plus d’informations dispose des références nécessaires pour se les procurer.

Troisièmement, et c’est encore plus remarquable, le rapport conclut que nous faisons vraiment des progrès sur plusieurs fronts, sinon sur tous, soulignant que « durant les sept années qui ont suivi les accords, presque toutes les instances ont apporté des changements considérables à la prestation de leurs services de santé ».

Toutefois, cette analyse révèle deux failles importantes dans ce que nos 14 systèmes de santé entraînent pour les Canadiens : 1) nous ne mesurons pas adéquatement les répercussions sur les résultats de santé des changements qui touchent les systèmes, et 2) un principe fondamental de la Loi canadienne sur la santé, l’universalité, n’est pas appliqué systématiquement d’un bout à l’autre du pays.

Le but explicite de ce rapport était d’évaluer l’amélioration de l’accès aux soins, la qualité de ces soins, et l’innovation en santé. En matière d’accès, et également en ce qui concerne l’innovation, il a traité les données disponibles de façon approfondie. Cependant, et sans qu’on puisse le lui reprocher, ce rapport ne peut simplement pas aborder la question de la qualité, à part quelques exceptions.

En dépit des demandes de responsabilisation, de surveillance et d’évaluation, que ce soit dans les accords eux-mêmes ou dans n’importe lequel des nombreux rapports qui ont fleuri à la suite de leur signature, nous n’y sommes pas encore arrivés. Par exemple, sept ans plus tard, la comparabilité entre les provinces en est à ses tous débuts. L’information publique concernant les garanties quant aux temps d’attente n’est pas d’accès facile et les données sur son utilisation sont tout bonnement inconnues. L’information qui provient des centres d’imagerie n’est pas d’accès facile. La liste continue.

Donc, même si nous pouvons et devons tirer une certaine fierté des progrès accomplis, ce rapport du Conseil nous révèle qu’on ne peut pas simplement « acheter » la santé. Nous pouvons éroder le périmètre du système, et nous pouvons introduire des changements isolés qui, pris ensemble, peuvent « servir à quelque chose ». Nous avons sélectionné et mis en place nombre d’excellents « outils », depuis les cyberinitiatives et les nouveaux systèmes d’information sur les médicaments jusqu’à l’intégration des services et l’amélioration de la définition des rôles. Toutefois, nous devons également nous poser, les uns aux autres, mais aussi à nos dirigeants, quelques questions très difficiles :

·         Qu’en est-il du droit, inscrit dans la loi, de tous les Canadiens au « même niveau de soins de santé », quel que soit leur lieu de résidence au Canada?  

·         Qu’en est-il du droit du contribuable de savoir si les changements payés avec son argent produisent les résultats de santé auxquels il s’attend pour son investissement?  

·         Quand tous les bailleurs de fonds et les influenceurs vont-ils adopter envers nos tentatives une approche constructive de coopération, assurant que la santé des Canadiens et de la nation prend le pas sur les intérêts sectoriels et les questions de compétence? 

J’attends avec intérêt un prochain rapport du Conseil canadien de la santé, à un moment où il sera possible de relier les points entre les changements du système de santé et des résultats de santé exacts, où des services de santé comparables seront offerts à tous les Canadiens, quel que soit leur lieu de résidence, et où objectifs, mesures et mécanismes de responsabilisation seront monnaie courante.


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